lundi 12 juin 2017

Eux [J'ai écrit]

Ils hurlent dans ma tête comme un silence intense brûlant chacune de mes pensées. Dans l'incompréhension des sons, je préfère me perdre et ne plus respirer. Je ferme les yeux pour ne pas les voir, mais plus la pièce s'assombrit et plus leur présence se fait pesante. J'écoute avec intérêt leurs conversations, sans jamais vouloir qu'ils me parlent, mais ils ne m'oublient pas, alors que moi je voudrais qu'ils n'existent pas.
Le chuchotement de leurs cries et comme un appel à l'aide face à la solitude de la réalité. Ils ne partent plus, ils restent dans cette pièce à attendre ma venue, ils attendent mes cries, ma fureur, mes écrits, ils savent que leur présence me fera être différente. Tu ne m'aimera plus. Ils s'approchent, je ne veux pas qu'ils me touchent, je ne veux pas sentir leur peau froide sur mon corps frissonnant, mais plus le temps passe et plus leur étreinte est palpable.
Leurs silences me mettent mal à l'aise, leurs sourires me poussent à te haïr. Je veux être Marianne Engel, me perdre dans mon art, plonger dans la mer glacée disparaître sous la houle des vagues, sans aucune peur, aucune pleure. Je ne veux plus converser de toi, surtout que d'eux il ne reste que moi.

lundi 5 juin 2017

Elle [J'ai écrit]

Je m’étais habituée à cette nouvelle vie, métro, boulot, dodo. Je ne m’étais pas préparé à ce qu’elle surgisse du passé.
J’étais occupée à autre chose, sans aucun rapport avec elle, je ne pensais même pas à elle, mais lorsque mon téléphone sonna, cela changea la donne.
Elle n’eut pas grand-chose à dire. Elle avait des problèmes. Je laissai tout en plan et je pris la voiture sans réfléchir, je partis pour cinq heures de route.
Je me souviens de notre première rencontre, j’étais partie en vacances dans une villa au bord de la mer, j’avais fait sa connaissance lors d’une soirée. Léa. Son nom me fait encore frissonner aujourd’hui. Tous les hommes tombaient sous son charme, petite brune, au visage illuminé par ses tâches de rousseur. Elle avait l’allure et le comportement d’une femme-enfant : insouciante et jouant de tous ses charmes.
Moi, je la trouvais juste sympa. A l’époque, jamais je n’aurai pensé être attirée par une femme.
Seule dans ma voiture, je souriais, pleurais, m’énervais. Elle m’avait fait passer par tant d’émotion. Elle avait réveillé en moi quelque chose que j’avais tant tenté de refouler. J’avais 23 ans à l’époque, et elle était mon premier amour.
J’avais cru aimer avant elle, mais il n’en était rien. L’amour n’a rien à voir avec la sympathie, la simple affection. L’amour n’est pas tendre, il est violent, brûlant, destructeur. L’amour n’est tendre que lorsqu’on rend les armes et qu’on se laisse entièrement dévorer. Avant cela, ce n’est qu’un combat, un corps à corps dont on sait que l’on sortira perdant.
Je ne l’avais même pas senti venir. On passait beaucoup de temps ensemble. On allait de soirées en soirées, on buvait et se droguait toujours plus.
Notre premier baiser, n’en fut pas un, c’était un geste insignifiant. Elle sauta dans mes bras et déposa un baiser sur le coin de mes lèvres pour une réussite quelconque.
Ce n’était pas grand-chose, mais c’est comme si je sentais mon cœur battre pour la première fois, j’eus l’impression que le temps avait ralenti pour me permettre d’apprécier chaque particule de cet instant anodin mais magique.
Je n’envisageais pas pour autant autre chose qu’être son amie. Jusqu’au soir où on plongea tout habillées dans une piscine, juste pour le délire. On jouait comme des enfants, jusqu’à ce que nos deux visages se retrouvent à quelques centimètres l’un de l’autre. Mon regard alla de ses yeux verts à ses lèvres pleines, mon cerveau tournait tellement vite que j’avais l’impression de ne plus penser à rien.
Je me laissai emporter par l’instant et déposai mes lèvres sur les siennes en m’agrippant à sa nuque. Elle me rendit mon baiser pendant quelques secondes avant de me repousser en me disant qu’elle n’était pas homo. « Moi non plus ! Répondis-je, et en plus je suis défoncée, mais j’en fais pas toute une histoire. »
Elle prit un instant pour réfléchir à cette argumentation sans queue ni tête et y adhéra. Elle m’embrassa à son tour, et ce fut comme si mon corps, mon cœur se remplissaient pour la première fois de vie.
Avant son appel, je n’avais plus eu de nouvelles pendant deux ans, on avait cessé de se parler après une dispute sur nos sentiments non partagés. Notre relation n’avait pas survécu à cette idylle. Ce n’était pas ni la drogue, ni l’alcool qui me faisaient agir ainsi, même sobre, j’étais ivre d’elle. Alors qu’elle ne m’aimait que les veines remplies de poison.
J’avais rêvé qu’elle vive une vie simple avec petit copain et futur bébé et qu’un jour au hasard d’une rue on se croise et que l’amour serait plus fort que tout le reste.
Ce rêve était loin. Elle n’avait pas de vie paisible, juste des problèmes.
J’arrivai à son adresse. Un amas de préfabriqués et de mobil home, rien de très glamour pour nos retrouvailles. Je frappai à la porte, le cœur tambourinant à mes tempes.
Quand elle m’ouvrit, j’eus l’illusion de voir la même femme-enfant que deux ans auparavant. Puis d’une voix tremblante et usée, elle me demanda d’entrer et je me rendis compte qu’elle avait été complètement brisée par la vie.
Son corps était squelettique, recouvert de bleus et d’égratignures, lorsque mon regard se posa sur la plaie purulente au pli de son coude, elle tenta de la dissimuler, c’était certainement là où elle se piquait.
Pendant que nous mangions dans un restaurant elle me raconta tout en épiant toutes les personnes qui la jugeaient du regard. Elle sursautait au moindre bruit et se forçait à manger quelques frites.
Elle voulait s’en sortir et tout arrêter avant que la drogue ne la détruise totalement. Son dealer n’était pas du même avis, il venait quand elle était en manque, la frapper, la violer avant de lui donner sa dose.
Elle n’avait pas la force de porter plainte. Je ne pouvais que prendre contact avec une assistante sociale pouvant l’aider. Je ne pouvais rien faire de plus.
Lorsque l'on retourna chez elle, elle me prit dans ses bras pour me remercier. Ce fut le premier contact physique qu’on échangea depuis mon arrivé.
Je ne pus m’empêcher de la toucher. Mes doigts se heurtaient aux os trop saillant de son doux visage. J’embrassai ses lèvres sèches, elle ne me repoussa pas, elle semblait avoir attendu ce moment autant que moi. Alors qu’elle se retrouva nu devant moi, je constatai toutes les marques laissées par la drogue, l’alcool, les coups… Malgré tout cela, je la trouvais belle, magnifique.
Je n’étais pas sûre de ne pas rêver. Nos deux corps nus s’étreignaient sur le vieux matelas. Je lui fis l’amour et son regard semblait reprendre vie. Lorsqu’elle mordit sa lèvre inférieure, c’est comme si ces deux ans n'avaient jamais existé, comme si je n'avais connu qu'elle.
Au milieu de la nuit, je me réveillai.
Elle était allongée de tout son long sur moi, telle une couverture gelée… La couverture de la mort.
Je me dégageai, me rhabillai.
Debout au seuil de la porte, je la regardai une dernière fois, elle semblait dormir paisiblement.
Je franchis la porte, tout ça n’était déjà qu’un pâle souvenir, tout comme sa vie…

jeudi 1 juin 2017

[J’ai fait] un voyage à Londres



C’est un voyage que je voulais faire depuis longtemps, mais les aléas de la vie ont fait que j’ai toujours dû repousser à plus tard.
Et puis j’en ai eu marre, j’ai pris un sac à dos, un carnet de voyage, j’ai sauté dans un bus et j’ai débarqué à Londres avec Alix Ly et Dan.
On a connu de très longues journées de marche, des réveils à l’aurore en même temps que l’éclosion des fleurs.
On a beaucoup mangé. Le petit-déjeuner, le déjeuner, le goûter, le dîner. On a mangé sous un dôme au bord de la Tamise, et Alix a « trouvé » un livre.
On a visité des parcs à l’aurore. On a vu des pommes attachées à des arbres par une ficelle, c’est un peu une déstructuration du pommier.

On a vu Poudlard.


On a vu des animaux, pleins d’animaux. 

On a vu plein d’édifices, on a vu Big Ben. 

On a vu plein de parcs verdoyants, j’ai même pris un coup de soleil. Oui, je suis la seule créole qui se prend un coup de soleil à Londres, je suis unique que voulez-vous, ne soyez pas jaloux.

Alix a partagé son don pour le dessin.


On a vu pas mal de sculpture, beaucoup de chevaux, plusieurs de boules, certaines plus vraies que nature et d’autre plus ironique.


On a vu des églises, de très veilles églises, des tombes dévorées par des arbres. On a vu des gares, des voies 9 ¾. On a vu des arbres de feu tricolore, et même un tank.


On a vu des écoles, des universités, des musées, des trains, des métros, la Piccadilly line. On a vu des gens qui partent au travail, des gens qui ne font pas la gueule et qui sourient dans les transports en commun.
On a vu des pierres et la ville natale de Shakespeare. On a vu plein de touristes. On a vu des Taxis, plein de taxis de toutes les couleurs, et je me suis déboitée l’épaule.


On a vu des acteurs, on a vu David Tennant. On a beaucoup vu David Tennant, au cinéma, au théâtre, je crois qu’il a fait le voyage avec nous.
On a vu des cabines téléphoniques, certaines recyclés, et on a vu le Tardis aussi.


On a vu des gens qui parlaient anglais, des gens qui parlaient français, des gens qui parlaient d’autres langues. Je vous ai dit qu’ils avaient le sourire aux lèvres. On a vu des gardes de loin, des spectacles de rue, et Alix nous a fait une imitation de Charlie Chaplin.

On a fait beaucoup de choses en une semaine, mais c’était quand même trop court. J’ai adoré ce voyage, et je n’ai qu’une hâte, recommencé…

Qui m’accompagne ?